Les réalités de l’industrie sont souvent bien éloignées de la perception du grand public. On nous propose des personnes, quelque fois, on nous les impose, et c’est devenu tellement récurrent qu’on finit très souvent par oublier que derrière ces images et souvent “artistes” ou pseudo-artistes, ce sont  malgré tout, et avant tout, de simple êtres humains. Des êtres humains mis en avant, destinés à être certaines choses par certaines personnes, certains directeurs de labels qui se remplissent tranquillement les poches pendant ce temps-là. Justin Bieber est une superstar pour ado qui a envahi les ondes mondiales à coup de titre sirupeux et de refrains répétitifs et profondément puérils. On se souvient encore de “Somebody to love” ou du fameux  “Baby” qui lui ont valu d’incarner la haine de la part d’une partie du public. Adulé des uns, complètement vomi des autres, c’est le lot de toutes pop stars me direz-vous.. mais tout le monde ne le vit pas de la même façon et surtout pas quand on a 14 ans et qu’on essaie finalement de trouver un sens à sa vie. D’aucuns diront qu’il s’est rempli les poches et devrait savoir s’en contenter… tout le monde n’a pas la chance d’être millionnaire à son âge… ce n’est sûrement pas faux… mais très clairement, ça ne fait pas tout. Ce 4ème album en est la preuve.

Après mille et un déboires, une recherche d’un son et un album très R&B, “Journals“, (et réussi) totalement effacé de sa discographie, Justin a trouvé la note parfaite entre ambitions mainstream et but artistique. Comme décrit plus haut, ce n’était pas gagné, mais avec “Purpose“, il réussit à montrer qu’il peut grandir artistiquement parlant, faire de sa musique une sorte de thérapie, tout en n’omettant pas d’avoir des singles parés radiophoniques. L’album, travaillé aux côtés de Diplo, Skrillex, ou encore Bei maejor et Benny Blanco, lui permet de réussir cette association.  Les singles pop comme “Where Are U Now”, le plus acidulé “Sorry” ou encore le mélancolique et très inspiré par Craig DavidWhat Do U Mean” ont réussi à l’imposer dans les radios mondiales tandis qu’on retrouve une maturité plus assumée sur des chansons comme “Love Yourself”. Le nouvel extrait de l’album, titre co-écrit par Ed Sheeran dont on reconnait la patte et qui tend vers cette idée de réalité-banalité très crue qu’a envie de décrire Justin est déjà plus représentatif de l’idée globale du projet. Une réussite d’un point de vue mélodique, un refrain accrocheur et surtout un texte facile et très fédérateur, mais ce n’est pas la seule. À défaut d’avoir un timbre de voix extraordinaire ou une véritable identité harmonique, Justin est un fan de R&B qui écoute tout et copie beaucoup. C’est ainsi qu’on retrouve tour à tour des influences de The Weeknd, de The Dream ou encore de R.Kelly  au fil des chansons qui se suivent souvent pour s’assembler. C’est le cas de “I’ll Show You“, de “Compagny” ou encore du très efficace “No Pressure” sur lequel Big Sean vient lui prêter main forte. Il n’oublie par pour autant qu’il a un public adolescent et que c’est ce public qui fait encore sa popularité, c’est pour ça qu’on a la ballade un peu niaise (mais pas bien méchante) “The Feeling” avec Halsey. Un titre un peu banal, mais finalement bien isolé dans l’opus vu qu’il sait faire appel à Nas pour le pointilleux “We Are” avec sa touche old school, la touchante “Trust” avec ses vibes qui se rapprochent de la scène R&B indé et bien sur “Purpose” qui ferme la première partie de l’album avec une certaine classe.

https://www.youtube.com/watch?v=AxVyQWmfT3w

Le titre “Purpose” nous plonge dans cet esprit de repentance très américain, très grandiloquent, mais il fonctionne bien. Très bien écrit, très belle mélodie au piano et surtout un message autobiographique qui a du fond. Celui d’un garçon de 23ans qui a tout eu ou presque à 14 ans, a fait des conneries, a été enterré par la majeure partie des médias (y compris Musicfeelings, on n’y croyait pas à ce retour en force) et qui par la force des choses, et à la surprise générale, a réussi un comeback gagnant.

Il dit s’être trouvé un but, il remercie son public de l’avoir aidé à y arriver. Sa carrière, la vraie, commence donc maintenant. Reste maintenant à savoir ce qu’il en fera.

 

14/20.