C’était sans doute aucun l’une des principales révélations de l’année 2015, Anderson .Paak a explosé aux yeux du monde sur l’opus Compton de Dre. Si l’album de Dre en a déçu quelques-uns, la prestation du jeune homme a mis tout le monde d’accord. Agile, subtile et versatile, les qualificatifs n’ont pas manqué pour définir la présence d’Anderson qui intervient sur une grande partie des titres du disque.

Il a ensuite proposé 2 ep distincts, au mois de Decembre, avant de livrer Malibu. Un second opus qui fait du bien en ce début d’année 2016. Il a su tenir le défi du buzz et même le défier vu que l’album est encore meilleur que tout ce qu’on pouvait espérer.

En effet, plus qu’un simple opus, ce projet est une reconstitution musicale de la musique noire américaine des 50 dernières années à travers le regard d’un très talentueux jeune homme de  29 ans.

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La pochette du disque est à l’image de son contenu. On a bien l’idée de ce melting-pot, ce mélange d’influences allant du blues de Bessie Smith à la soul d’un d’Angelo pour tantôt titiller le hip hop d’un Kendrick Lamar, la vibe old school d’un Nas, ou même le groove d’un Kem et le gospel d’un Kirk Franklin. Bilal et Raphael Saadiq sont ses grands frères. Il est partout, touche à tout et la plupart du temps avec une grâce détonante. Anderson incarne une sorte d’éveil d’une soul moderne à la fois hip hop et funk venue de Californie.

L’album s’ouvre sur la chanson The Bird qui annonce directement le ton aussi bien d’un point de vue sonore que lyrique. Anderson écrit et le fait plutôt très bien; il nous raconte l’histoire de sa vie. On comprend alors que celle-ci n’a pas toujours été tendre. Fils d’une fermière née en Corée du Sud et d’un mécanicien américain. Il a 7 ans quand son père est emprisonné pour avoir battu sa mère à mort ou presque. Il ne le reverra plus jamais et, comme si ça ne suffisait pas, sa mère est elle-même appellé à purger une peine de 10 ans de prison pour malversations 10 ans plus tard. Une vie complexe donc qu’il introduit dès l’entrée en expliquant qu’il n’a jamais vraiment eu droit à l’erreur “Mama was a farmer, Papa was a goner, so i did the best i can“. Mais s’il est mélancolique, tout n’est pas sombre dans le monde d’Anderson Paak qui parle aussi de sa soeur qui chantait sur du Whitney Houston, son oncle qui a dû tout assumer ou alors de ses amis qui n’ont jamais cessé de croire en lui.

Une autobiographie qui se divise en 16 pistes plutôt costaudes et souvent savamment produites. Lorsqu’il ne réalise pas lui-même les arrangements avec son groupe The Free Nationals, Paak fait appel à Dem Jointz, DJ Khalil, ou encore Hi-Tek.

On est donc comme à la maison dans ce meli-mélo de confidences qui reste néanmoins appuyé par un solide bagage musical. On a de vrais instruments, l’album respire. Les cuivres, le piano, les basses rebondissantes: ça vibre. Heart don’t stand a chance est magnifique, magnanime et voluptueuse; elle aurait pu briller de milles feux sur le Channel Orange de Frank Ocean. Il fait ensuite tôt t de rejoindre SchoolBoy Q sur le punchy et efficace “Am I Wrong”, Bj Chicago Kid vient soutenir sur le vaporeux et gospel “The Waters” mais ça ne s’arrête pas là. Comme dit plus haut, l’une des forces de cet album est que Anderson surfe avec élégance, sans aucun effort entre les genres. Il sait aussi bien jouer de ses facilités avec les ambiances soul comme sur “Put me Thru” et “Come Down” (qui rappelle du James Brown) que sur des titres plus R&B comme l’extatique “Waterfall” ou le brillant “Silicon Valley“. Et si vous voulez danser, pas de soucis, il répond également présent avec le brillant “Lite Weight” qui mélange discofunk et hip hop 90’s. On est constamment baladé entre diverses colorations de la blackmusic et ça fait du bien. Une fraicheur sans singles calibrés et qui porte aussi un message d’espoir, aussi bien d’un point de vue personnel ( The Dreamer) que d’un point de vue musical dans l’industrie en général. Il nous fait rêver, voyager et prouve qu’on peut encore avoir de bons albums, des artistes qui sortent un peu des carcans. De beaux “malibus” à consommer tranquillement, jalousement en ces temps où la créativité se fait très rare sur la scène musicale.

17/20.

Il vient de proposer une vidéo qui regroupe 3 titres ” “The Season / Carry Me” et “The Waters”.