Après une décennie d’attente, une décennie de galères aussi – qu’elle nous avait racontées dans son interview – Jojo a enfin sorti son 3e album “Mad Love” cette semaine. La chanteuse, qui a commencé à enregistrer des disques à 10 ans, est presque une vétérane de l’industrie récente du disque, alors qu’elle n’a que 25 ans.
“Mad Love”, qui arrive après une période creuse, était le moyen pour elle de se repositionner dans une industrie où elle semble avoir été remplacée par des jeunes filles comme Ariana Grande et Tori Kelly, qui jouent de leurs talents vocaux sur des mélodies Pop-R&B, comme elle même le faisait à une époque. Un pari difficile pour cette grande fan de Rhythm & Blues, qui admet aussi devoir faire des concessions pour rester en connexion avec une audience pop mainstream qui l’a vu grandir. Après son dernier ep – plutot mal reçu- elle fait une sorte de compromis sur cet album, qui fait un démarrage toute somme correct (19.000 ventes) au vu du manque d’exposition et d’une industrie clairement en berne. On est cependant loin du grand comeback attendu, rêvé, voulu, et de la ferveur qu’elle aurait pu susciter autour d’elle.

[Focus/Interview] Jojo :  » Mon Album sortira en 2016 ou alors je casse tout ».

Si le premier single “Fuck Apologies”, bien que sympathique, nous ramenait (un poil trop) au milieu des années 00’s, sorte de revival nostalgico Pop-R&B, le reste du disque est dans une mouvance plus actuelle. C’est très loin de sa mixtape “Agape” et de ses ep mais, dans un sens, c’est une direction logique au vu des attentes et des espérances qui sont les siennes. Là où le bas blesse, sur Mad Love, est qu’elle n’a sans doute pas eu le soutien financier nécessaire de la part de son label et on ne retrouve aucun gros producteur sur le disque. Le gros producteur ne fait pas le grand album, on a des exemples de cet état de fait tous les jours; en revanche, c’est mieux d’avoir un producteur populaire qui nous produit une chanson avec son style que d’avoir des producteurs moins connus qui essaient comme ils peuvent de recopier l’œuvre de ce dernier.

Introduit par la ballade aux accents pop “Music”, où elle se confie sur ses années d’errance et son envie de voir son père fière d’elle, l’album nous balade sans jamais briller. On n’a pas la candeur de “Can’t Take That Away from Me” ou la mélancolie de “Agápē”. “I Can Only“, avec Alessia Cara, est un titre punchy et extatique, qui apparait comme l’une des possibilités de singles aux côtés de “Vibe”, qui sonne comme une énième reprise estivale de DJ Snake. La voix de JoJo est là, elle brille sur “Mad Love” mais à aucun moment, malheureusement, elle ne réussira à sortir des sentiers battus et à se dépasser. “Edibles” est sans doute aussi l’un des meilleurs titres avec sa tendance R&B indé et sa production lascive qui n’est pas sans faire écho aux travaux de de Drake et de DVSN. Toutefois, il arrive un peu comme un cheveu sur la soupe dans ce disque, qui ne manque pas de talent mais de magie. “Mad Love” est un album fait en 2016, pour 2016. On trippera encore quelques temps sur “Fab” et les quelques punchlines bien trouvées de son texte mais, de manière générale, l’ensemble est bien trop générique pour un album qui a pris 10 ans à sortir, surtout que les mixtapes proposées avant sont bien plus abouties et fraiches que cet album qui ressemble à une soirée d’un conte de fées. Dès le 31 décembre 2016, la plupart des titres seront totalement avariés tandis que “Demonstrate” reste encore sacrement groovy.  Un comble, mais surtout la preuve qu’elle mérite assurément mieux.

12.5/20.