L’impuissance des stars et leur manque d’impact dans les élections aux USA.
Suite à la défaite d’Hillary Clinton, il est assez logique de revenir sur le rôle des stars américaines dans sa campagne et sur les raisons qui ont mené à cet échec cuisant, en analysant l’appui des artistes dans sa communication.

La première est une évidence.

Internet et le monde réel sont 2 choses différentes. C’est peut-être bête de le dire mais c’est quelque chose qu’il faut entendre et se répéter.
Ce qui s’est passé sur les réseaux sociaux depuis plus d’un an est assez fascinant. La force du vent anti-Trump était si folle qu’on n’imaginait pas qu’il prendrait tout le monde de court. C’est pourtant ce qu’il a fait de la plus habile des manières. Il a pris le système à son propre piège. Si tu te décris comme un anti-système et que tout ce que tu fais provoque est à l’origine d’un profond rejet par ce fameux “système”, tu ne peux que renforcer ta base. Il est allé jusqu’au bout de son pari et ça a fonctionné. Il a eu l’audace de ne pas être une girouette qui s’adapte en fonction de son audience.

Ensuite..

C’est la défaite du #BlackLivesMatter. C’est un mouvement dont on a beaucoup parlé sur cette page. Il a semblé prendre de l’ampleur, beaucoup d’ artistes noirs l’ont suivi musicalement; certains artistes blancs aussi. Ceux qui disaient “AllLivesMatters” étaient carrément mal vus.
Il semblait y avoir une ferveur autour de tout cela, ajouté au fait que les artistes, ayant vu ce mouvement décoller, se sont lancés dans une récupération avec des chansons et des albums aux thématiques pro-black. On a cru sentir quelque chose monter, avec des lives (Beyonce et Kendrick, Kendrick aux Grammys, etc.) et tout le monde, ou presque, s’est engouffré là-dedans.
Il y avait bien des irréductibles qui s’exprimaient quelques fois, critiquant le #blacklivesmatter, les projets pro-black, Beyonce, Jay-Z mais on avait l’impression que c’était toujours une minorité.
Les beyhive attaquaient les journalistes de la Fox matin-midi-soir; les journalistes moquaient les déclarations pro-Trump. Tout était en faveur du clan Hillary, qui elle s’est prise à ce jeu et a donc fait une campagne de façade avec toutes les célébrités et artistes mondiaux.

 

Le résultat est sans appel. Le mouvement s’est “maintreamisé” et s’est finalement perdu dans une espèce de vide et, dans une certaine mesure, ces prises de position ont fait réagir l’Amérique profonde.
Les gens qui ne tweetent pas forcément, qui ne sont pas présents 24h/24 sur la toile mais qui ont voulu dire “STOP”.
D’une part, parce qu’ils ne comprenaient pas ces mouvements mais surtout parce qu’ils ne se sentaient pas représentés, totalement exclus, voire moqués. Ils ont décidé de réagir…
Cependant, la chose qui leur a vraiment permis d’asseoir leur victoire, c’est le manque total d’impact des célébrités et particulièrement des artistes noirs, principalement bling-bling sur leur audimat.
C’est un vieux souci. Déjà en 2004, Diddy, Brandy, Ashanti, MJB, et tous les autres se retrouvaient pour pousser la jeunesse américaine à voter avec un titre: il fallait barrer la route à Bush face à John Kerry et ce fut un cuisant échec.
L’effet “Obama” 2008 a galvanisé les troupes et fait penser à certains qu’il y avait une évolution de ce côté-là, mais pas du tout.
Les gens aiment ces artistes pour ce qu’ils font. Ils aiment les voir à la télé, chanter, écrire mais, très clairement, leur influence s’arrête là. Dans la vraie vie, il n’y a pas la Beyhive, ces folies et extrêmes du genre; les gens pensent d’abord à eux.

Ce n’est pas parce que Pink, Alicia Keys, Pharrell et tous les autres disent de voter ou de faire quelque chose qu’on va le faire. Ils sont dans une réalité qui n’est pas la nôtre.
C’est d’autant plus grave et plus violent pour les artistes noirs car il y a le #BlackLiveMatters. Il y a des morts; il y a une situation “grave” et ils ont récupéré le message à porter en façade… Normalement, ils auraient dû booster les urnes, mais le désintérêt a été total, alors qu’il n’y a jamais eu autant d’appels aux votes.
Nous (sur Musicfeelings, mais ailleurs aussi surement) étions embaumés dans les soirées chez Obama, roi du swagg, avec tous les autres. On chante, on danse sur “Hotline Bling” entre millionnaires, et l’on fait, par la suite, des discours émouvants. Tout le monde il est beau, tout le monde il est mignon. Le mal c’est mal; le bien, c’est super bien. Les jaloux, c’est pas beau. Cela s’est partagé des milliards de fois sur le net…mais ce genre de choses ont contribué à agacer profondément l’électorat blanc moyen, tandis qu’elles n’ont pas du tout donner envie aux noirs d’aller soutenir Hillary.
Car dans tout ce bling-bling ghetto qu’affiche la majeure partie des artistes américains depuis 15 ans (et qu’on retrouve dans les séries pour finir par faire croire à certains que les noirs au USA, ce n’est que ça), on finit par oublier qu’il y a certes les ghettos aux USA, mais il y a aussi, depuis les années 80’s, une classe moyenne afro-américaine qui n’a cessé de grandir et qui a un certain niveau intellectuel, certaines positions et qui ne va sûrement pas se laisser balader parce que tel artiste a dit ceci ou cela dans sa nouvelle chanson trap.
Les gens ne sont pas des marionnettes; ils ne sont pas de simples “likes”, de simples “followers” assujettis à la gloire d’auto-proclamés rois ou reines des dancefloors. Ils ont des histoires et tant qu’ils n’auront pas l’impression qu’on porte leurs histoires de manière sincère, ils ne se lèveront pas.
Aujourd’hui, ils vont tous se focaliser sur les injures (comme Janelle Monaé, etc.) à envoyer aux gens qui votent Trump mais personne ne fera l’analyse de fond qu’ils ont à faire sur les valeurs qu’ils transmettent et la manière pour eux de changer le quotidien de leur population, sur le fait que toutes leurs vidéos et tous leurs messages n’ont pas été entendus.
– La Bipolarité… Des changements de position tous les 2 jours. Des chansons qui prônent la drogue le matin tandis que le soir on fait la morale. Des chansons qui parlent de sexe et, en même temps, des artistes qui se décrivent comme faisant partie d’un mouvement militant, etc.
– Le manque de sincérité… Personne, aucune célébrité noire, n’a osé dire que le second mandat d’Obama était effarant de ridicule. Il n’était même plus capable de nommer un juge, bloqué par le sénat et la chambre depuis plus de 2 ans. Il s’est organisé avec sa femme pour animer Internet, ce qui fut un succès: nous les voyions partout et apprécions cela et ce fut à peu près tout. Pour toutes les mesures, y compris le #BlackLivesMatter, il pleurait. Personne n’a osé dire que son bilan à ce niveau était désastreux. Pourquoi? Parce qu’il les invite à la Maison Blanche. On chante, on twerke sur “Formation” et on fait les beaux discours sur ce qu’il faudrait faire… et qu’on ne fait pas alors qu’on est aux manettes. C’est partagé sur le net; c’est swagg. Parfait.
Cependant, pendant qu’ils font tout ce cinéma, les gens partagent chez eux, depuis leurs réalités à eux, vous les divertissez, certes, mais cela s’arrête là.
Un président blanc aurait eu le même mandat que le second mandat d’Obama que ces mêmes artistes l’auraient crucifié, mais comme ils ont de bonnes relations avec lui personne n’ose le faire… Pire encore? Ils viennent demander avec Obama de voter pour Hillary.
Crédibilité zéro… Copinage: 20/20.
Du discours, de l’image, du discours, de l’image… et encore du discours et de la belle communication.
Sauf que quand les paroles s’envolent, les vidéos FB se terminent et le twerk dans les clips s’arrête, les gens doivent faire face à la réalité. C’est ce qui a galvanisé les fans de Trump et qui a fait en sorte qu’une bonne partie de l’électorat Latino (30%) le soutienne également. Enfin, c’est aussi à ça qu’on doit le fait qu’une grosse partie de l’électorat noir ne se soit pas senti concerné par le scrutin malgré les très nombreux appels d’une très grande partie de son “élite”.

D’ailleurs, n’iront-ils pas chanter à la Maison Blanche, dans quelques mois, si Trump les y invite? Il y a fort à parier que s’ils en ont l’occasion, beaucoup n’hésiteront pas….

Recherché de visibilité 20/20. Attrait au pouvoir 25/20… Crédibilité……

Triste Réalité!